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C’est un fait que les personnes étrangères sont surreprésentées dans les statistiques criminelles et dans la population carcérale. Cependant, il est relativement simple de démontrer que ce sont d’autres éléments que la nationalité qui influencent la criminalité.
Premièrement, les personnes étrangères se rendent majoritairement coupables de délits qu’elles seules peuvent commettre. La statistique 2023 de la police fribourgeoise le montre clairement : dans les infractions imputées aux requérant·es d’asile, 71% sont liées au statut de séjour, comme le séjour illégal (le fait de séjourner en Suisse après une décision négative d’asile, dans l’attente d’un renvoi par exemple) ou la violation de l’interdiction de périmètre.
Deuxièmement, deux des catégories les plus déterminantes de la criminalité sont le sexe (les hommes sont concernés par 85% des condamnations) et le niveau économique (les personnes provenant de milieux modestes sont responsables de 60% des infractions). Les personnes étrangères, et plus particulièrement celles qui relèvent de l’asile, sont surreprésentées dans la seconde catégorie.
Troisièmement, et c’est le corollaire du deuxième point, les personnes étrangères sont surtout coupables de petite délinquance, appelée aussi délits de nécessité : vols, brigandage, travail illégal, etc. Elles sont moins représentées dans la commission de crimes graves. Du point de vue du tort fait à la société, il serait pertinent de se demander si l’évasion fiscale ou les salaires et boni abusifs ne mériteraient pas plus d’attention que les délits mineurs commis par quelques centaines de personnes en situation de précarité.
Il est préoccupant de constater qu’un élu utilise des arguments simplistes pour légitimer des violations grave des conventions internationales, tout en faisant un usage trompeur des chiffres :
Il affirme que la Suisse « accueillit 50’000 personnes par an ». Nuançons : En 2023, selon la statistique du SEM, la Suisse a enregistré 30’223 demandes d’asile, incluant les naissances, les regroupements familiaux et les demandes d’asile secondaires ou multiples (suite à un retour en Suisse ou un changement de pratique). Cela ne signifie pas que toutes ces personnes ont été « accueillies » : certaines sont nées ici, d’autres étaient déjà sur le territoire, et beaucoup sont encore en procédure ou en instance de renvoi. A cela s’ajoutent 23’012 demandes de protection déposées par des personnes ukrainiennes, qui reçoivent un statut S sans passer par le système d’asile. De plus, l’année 2023 se démarque par un nombre de demandes spécialement haut, la moyenne des dix dernières années tournant plutôt autour des 22’000 demandes.
Le taux de protection pour les demandeur·ses d’asile en Suisse est élevé : en 2023, 25.7 % des personnes ont obtenu l’asile, et 54.4% une admission provisoire (un statut de protection qui autorise le séjour en Suisse et la perception de 60% de l’aide sociale). Parmi les demandes d’asile refusées, il y a les non-entrées en matière dites Dublin, qui n’appellent pas de décision sur le fond puisqu’un autre État est responsable de l’examen de la demande. En somme, près de 80% des demandes de protection sont fondées. Il ne s’agit donc pas « d’accueillir tout le monde », mais de respecter le droit international. La Suisse ne peut pas tout simplement décider d’un quota de personnes à protéger, ce serait violer les conventions internationales, dont celles sur les droits humains, dont la Confédération est signataire.
Il serait évidemment naïf de nier que la criminalité existe et que tout est rose autour du centre fédéral de Chevrilles (Giffers). Les conditions de vie et de travail y sont difficiles. Les habitant·es vivent des situations personnelles compliquées (il s’agit d’un centre de renvoi) et un quotidien précaire. Le personnel des centres, selon plusieurs rapports d’ONG et la Commission nationale de prévention de la torture, n’est pas assez nombreux et pas assez formé, ce qui a donné lieu à des situations difficiles dans le passé. Toutefois, des solutions ont été trouvées grâce à la collaboration entre bénévoles de la société civile, police, habitant·es et personnel du centre.
Selon Magdalena Waeber, bénévole dans le groupe « Flüchtlinge Willkommen im Sensebezirk » et directrice de la Plateforme pour la Société civile dans les centres fédéraux, la situation est désormais bien apaisée : « Les mesures prises ces derniers mois et ces dernières années ont contribué à apaiser la situation dans la Guglera. Les chiffres présentés récemment lors de la réunion du groupe de contact en juin ne confirment pas les déclarations alarmistes de l’UDC. La police cantonale et les communes font savoir que la situation autour du centre est actuellement calme et que la collaboration entre les différents partenaires fonctionne bien. Les TPF (partenaires locaux pour les transports publics) indiquent également qu’il n’y a pratiquement plus d’incidents comme en 2023 (par exemple, resquillage). Les bénévoles interviennent plusieurs fois par semaine dans et autour du centre et ne rapportent pas d’incidents qui se seraient produit. Au lieu de cela, ils rapportent des rencontres humaines touchantes avec les habitant·es, marquées par la gratitude, la solidarité et la qualité des échanges.»
Peut-être serait-il utile que les cadres de l’UDC visitent le centre de la Guglera. Ils pourraient ainsi rencontrer des demandeurs et demandeuses d’asile et voir la réalité de près, ce qui pourrait enrichir leur vision des choses. Le discours empreint de préjugés et de dédain montre clairement qu’ils parlent de personnes et de circonstances qu’ils ne connaissent pas.
Le gratin UDC qui a rendez-vous à la fromagerie Kolly : écrémez plutôt vos préjugés !
Une prise de position commune de la SCCFA et Solidarité sans frontières.